La Bulgarie est le seul pays au monde qui célèbre son alphabet lors d'une fête nationale. Le 24 mai c’est la fête de la culture, de l’alphabet slave et des Saints frères Cyrille et Méthode, créateurs de l’alphabet. Cette fête est l'expression de la fierté que ressentent les Bulgares du fait que c’est leur pays qui a accueilli, à la fin du IXe siècle, les disciples des Saint frères Cyrille et Méthode et qui a créé les conditions nécessaires pour la propagation de l’alphabet slave, ainsi que les premiers centres culturels dans le monde slave.

L’alphabet cyrillique , troisième alphabet officiel de l’Union européenne, fut créé par les Saints frères Cyrille et Méthode proclamés par le pape Jean-Paul II co-protecteurs de l’Europe. Les frères Cyrille et Méthode, connus comme les Apôtres des Slaves, sont d’origine bulgare (ils sont de la ville de Thessaloniki, leur mère est bulgare). Ils commencent leur activité en tant que missionnaires du christianisme et de la Byzance. Pendant leur troisième mission, en Moravie, ils comprennent qu’il serait impossible de professer la foi en latin ou en grec devant un peuple qui n’y comprend rien. C’est pour cette raison que Cyrille crée la première variante de l’alphabet, nommée glagolitza ou alphabet glagolitique, et continue, aidé par son frère, sa mission afin de faire connaitre à l’élite intellectuel des pays slaves cet alphabet, ainsi que la grande importance de celui-ci en tant que première possibilité pour les slaves d’écrire avec des lettres qui sont adaptées à leur langue, de traduire les textes religieux et donc de les rendre compréhensibles au peuple et enfin de créer leurs propres textes, leur propre littérature en leur propre langue. Donc la mission de Moravie devient le destin de Cyrille et Méthode. Après avoir été poursuivis en Moravie et en Bohème par le clergé allemand, après avoir obtenu du pape Adrien II la permission de l’utilisation du slavon comme langue liturgique et après la mort subite de Cyrille à Rome en 869, Méthode rentre en Moravie où il est nommé évêque et exécute la liturgie en slavon. Pendant leurs missions, Cyrille et Méthode ont formé des élèves qui les suivaient et travaillaient avec eux. Après la mort de Méthode en 885 et l’avènement à Rome du nouveau pape Étienne II, les disciples des Saints frères sont poursuivis en Moravie, ils sont même jetés en prison et torturés afin de renoncer à leur œuvre et à la liturgie en slavon. Certains d’entre eux sont vendus comme esclaves à Venise. Alors quelques uns des disciples des Saints frères - Clément, Naoum, Angélarii, Sava, après avoir couru de grands périls, arrivent en Bulgarie et y trouvent l’hospitalité du knyaz Boris I qui, comprenant l’importance de l’alphabet pour l’indépendance de son état et de l’église bulgare, crée toutes les conditions nécessaires à la propagation de l’alphabet, à la traduction des textes religieux en bulgare, à la formation d’une élite intellectuelle et à la création d’une vraie littérature originale bulgare. Le knyaz Boris I décide de fonder deux centres littéraires de formation du clergé bulgare et d’activité culturelle – l’un des centres, dirigé par Naoum, est situé dans la capitale Pliska et l’autre, dirigé par Clément – dans une région Sud-Ouest de la Bulgarie dont la ville principale fut Ohrid (de nos jours en Répulique de Macédoine). Après le couronnement du tzar Siméon, celui-ci déplace la capitale et l’installe à Preslav en y concentrant toute l’activité spirituelle et culturelle. Entretemps l’un des disciples de Méthode, Constantin, qui fut vendu comme esclave à Venise, est racheté et vient rejoindre ses compagnons en Bulgarie. Donc sous le règne du tzar Siméon, les deux centres de lettres – celui de Preslav et celui d’Ohrid fleurissent, les disciples de Cyrille et Méthode y forment des élèves bulgares, qui, à leur tour, traduisent et copient des textes religieux en bulgare et qui commencent à écrire leurs propres textes en devenant de cette manière les premiers écrivains bulgares, mais les premiers écrivains slaves aussi. Et Clément d’Ohrid crée la variante nouvelle de l’alphabet que l’on utilise encore, et qui est nommée alphabet cyrillique en l’honneur de Saint Cyrille. Clément d’Ohrid, Constantin de Preslav, et Naoum ne sont pas seulement des professeurs, ils sont de même des créateurs, des écrivains, des traducteurs qui ont laissé un riche héritage littéraire. C’est ainsi, en accueillant les disciples des Saint frères Cyrille et Méthode, que la Bulgarie devient le premier centre culturel et spirituel dans le monde slave. La grande reconnaissance des Bulgares envers les Saint frères et envers leurs disciples, se traduit dans la fête du 24 mai – l'une des fêtes les plus belles et les plus émouvantes du calendrier bulgare. On organise des célébrations dans les écoles, on fait des processions solennelles avec en tête les icônes des Saints frères et de leurs disciples (car ils sont tous canonisés par l’Église orthodoxe), c’est le jour ou l’on décerne des prix et des médailles aux intellectuels – instituteurs, écrivains, peintres, sculpteures, musiciens, artistes, scientifiques, etc. Chaque année le 24 mai une délégation officielle bulgare se rend à Rome, à la basilique Saint-Clément, pour se recueillir sur la tombe de Saint Cyrille et pour honorer la mémoire des Saints frères et de leurs disciples.